• l automne

    Vous me direz que vous n’aimez pas l’automne

    PAR CHARLES VINCENT

    Vous me direz que vous n’aimez pas l’automne, et je vous direz que vous avez tort. Complètement tort.

    C’est vrai: l’automne c’est la fin des gougounes, des coups de soleil et des cornets de crème glacée. Mais quand on y pense comme il faut, et je vous en prie, soyez honnêtes, pensez-y pour vrai, les gougounes, c’est laid, les coups de soleil, c’est dangereux, et les cornets de crème glacée, c’est mauvais pour la ligne. C’est là pure vérité.

    En revanche, l’automne, c’est les forêts qui s’embrasent, comme une finale de feux d’artifice. C’est des millions et des millions de feuilles aux amarres larguées qui papillonnent au gré du vent, mues par un gouvernail de fortune, ballotées par des ailes défaillantes, rabougries. L’automne, c’est le rouge, c’est le jaune. C’est le tas de feuilles mortes dans lequel on se vautre.

    L’automne, c’est aussi les bernaches et les oies qui bivouaquent sur nos lacs et picorent dans les champs, avant de filer à l’anglaise, à Cape May, New Jersey. L’automne, c’est les citrouilles et l’Halloween. C’est les randonnées en forêt. C’est les champignons et les premiers flocons. C’est le gel. C’est l’appel. L’appel de la cabane, de la soupe et du bouquin.

    L’automne, c’est la petite gifle au visage qui nous fait nous rappeler qu’on est encore en vie. C’est les joues rouges et les yeux pétillants. C’est la tuque, la chemise carreautée et les petites laines que l’on additionne pour s’auto-cocooner. C’est l’air frette qui nous récure les poumons et ravive en nous le coureur des bois, l’Alexis et l’Ovila.

    L’automne, c’est les premiers feux de foyer. C’est l’odeur de l’allumette, de la boucane et du bois cordé. C’est le retour de la flamme alliée, celle sans qui notre pays n’aurait jamais pu se déployer. C’est le jus de pomme chaud, le thé ou le café. C’est la bavette du poêle. Les chaussons mouillés. La peau et les os qui se sentent réconfortés.

    L’automne, c’est, vous n’aurez pas le choix de l’admettre, de la poésie en lingots.


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